mercredi 18 juillet 2012

France Vs Allemagne : Le comité d'entreprise


En Allemagne, la notion de cogestion est essentielle. La cogestion est basée sur la conviction que les règles démocratiques ne doivent pas se limiter au secteur de l'Etat, mais doivent être applicables dans tous les domaines de la société.

Amendée en 2001, la loi sur l'organisation sociale des entreprises régit la coopération entre les employeurs, le personnel, le comité d'entreprise, les syndicats et les associations du patronat.

La participation du comité d'entreprise et, donc, du personnel aux décisions prises dans l'entreprise est l'objectif fondamental de la loi. Les points essentiels qui figurent dans le droit de cogestion sont le temps de travail et l'organisation du travail ainsi que l'organisation des postes de travail.

Un important droit de regard prévoit que l'employeur doit entendre le comité d'entreprise avant tout licenciement. S'il omet de le faire, le licenciement est nul et non avenu. Parmi les tâches du comité d'entreprise figure son obligation de veiller à ce que les lois, décrets, prescriptions de prévention des accidents, conventions collectives conclues et accords d'entreprise en faveur des salariés soient bien respectés.

En France, Le comité d'entreprise est, l'une des institutions représentatives du personnel au sein de l'entreprise.

Institué par l'ordonnance du 22 février 1945 (corrigée par la loi du 16 mai 1946) dans toutes les entreprises de plus de 50 salariés, il détient des attributions à la fois sociales et économiques. Leur idée remonte aux Comités sociaux d'établissement mis en place par la Charte du travail en 1941. Elle a été ensuite reprise dans le programme du Conseil national de la résistance, en 1944.

La législation s'appliquant aux comités d'entreprise correspond au titre III du livre IV du Code du travail (de l'article L 143-1 à L 439-24).
Ainsi, les représentants du personnel s’efforcent de concilier leur travail professionnel, la surveillance de la marche de l’entreprise et la gestion des activités sociales et culturelles. Cela les amène à suivre une abondante actualité législative et jurisprudentielle.

Mais, le rôle du Comité d’entreprise en France, s’agit-il d’un pouvoir de cogestion comme en Allemagne ?

Nous allons donc énoncer dans une première partie les différentes missions des comités d’entreprise français et allemand, présenter ce qui est favorable ou pas au comité d’entreprise français dans une deuxième partie et au comité d’entreprise allemand dans une troisième partie. Pour terminer, nous établirons une introduction concernant le comité d’entreprise des deux pays face au licenciement économique.

I. Rôle et missions distincts des comités d’entreprise français et allemand.


En France comme en Allemagne, le comité d’entreprise, instance de dialogue et de concertation, doit être informé et consulté sur tout ce qui concerne la vie de l’entreprise. Cependant, l’approche et le rôle de celui-ci sont différents en Allemagne et en France.
En effet, dans les entreprises française de cinquante salariés et plus le chef d’entreprise est tenu d’organiser la mise en place d’un comité d’entreprise (CE) composé de représentants élus et syndicaux. Ce comité assume des attributions économiques d’une part, sociales et culturelles d’autre part et dispose, pour ce faire, des moyens matériels et financiers nécessaires. En Allemagne, il n’est pas obligatoire qu’une entreprise, quel qu’en soit le nombre de salariés, fonde un conseil d’entreprise. Les organisations syndicales, le chef d’entreprise ou le personnel doit en exprimer le souhait. Malgré cette absence de législation en la matière, la plupart des entreprises ont un comité d’entreprise, et un comité central d’entreprise, si celle-ci est constituée de plusieurs établissements pour défendre et améliorer les droits du personnel.

A. Le rôle du comité d’entreprise français.

a. Les attributions consultatives du comité d’entreprise

Le comité d'entreprise est obligatoirement informé et consulté sur les questions intéressant l'organisation, la gestion et la marche générale de l'entreprise et, notamment, sur les mesures de nature à affecter le volume ou la structure des effectifs, la durée du travail, les conditions d'emploi, de travail et de formation professionnelle du personnel.
Les principales consultations concernent :
- la modification économique ou juridique de l’entreprise (fusion, cession, OPA)
- les mesures affectant le volume ou la structure des effectifs (licenciement, recours ou chômage partiel)
- les mesures concernant la formation professionnelle
- les congés payés et autres congés
- les conditions de l’emploi et l’organisation du temps de travail
- l’introduction de nouvelles technologies
- les problèmes d’hygiène et de sécurité en liaison avec le CHSCT
- l’égalité professionnelle
- le bilan social
- le règlement intérieur, le droit d’expression

Le comité d'entreprise doit disposer d'un délai suffisant pour examiner la question qui lui est soumise.
La consultation du comité d'entreprise doit donner lieu à une véritable discussion et non pas à une simple information. L'employeur doit rendre compte, en la motivant, de la suite donnée aux avis et voeux du comité d'entreprise. Si l’employeur omet de procéder à ces consultations, il peut être sanctionné au titre du délit d'entrave au fonctionnement du comité d'entreprise par une peine d'emprisonnement de 1 an et une amende de 3750 Euros, ou une de ces 2 peines.
Toutefois, par dérogation à ce principe, le chef d’entreprise n’est pas tenu de consulter le comité d’entreprise avant le lancement d’une offre publique d’achat (OPA) ou d’une offre publique d’échange (OPE) portant sur le capital d’une entreprise. En revanche, il doit réunir le comité d’entreprise dans les deux jours ouvrables suivant la publication de l’offre en vue de lui transmettre des informations écrites et précises sur le contenu de l’offre et sur les conséquences en matière d’emploi qu’elle est susceptible d’entraîner.


En cas de situation économique préoccupante ou de recours abusif aux contrats à durée déterminée et aux contrats de travail temporaire, le CE peut exercer un droit d’alerte lui permettant de demander :
• des explications à l’employeur qui est tenu d’y répondre
• une expertise auprès des tribunaux
• la récusation du commissaire aux comptes


b. Les  attributions d’ordre social et culturel du comité d’entreprise

Le comité d’entreprise est également chargé de gérer les activités sociales et culturelles mises en place par l’entreprise au bénéfice des salariés et de leur famille, en vue d’améliorer leurs conditions d’emploi et de vie.
L'employeur ne peut s'opposer à l'exercice par le comité de ses attributions sociales et culturelles. Mais cette compétence exclusive du comité d'entreprise n'interdit pas pour autant à l'employeur d'exercer une activité sociale et culturelle. Il le fait alors pour le compte du comité d'entreprise qui conserve le contrôle de cette gestion. L'employeur peut également assurer la gestion d'une activité sociale et culturelle indépendamment du comité d'entreprise. Mais celui-ci peut alors à tout moment revendiquer la gestion de cette activité sociale et culturelle.

Les activités sociales et culturelles établies dans l'entreprise au bénéfice des salariés et de leurs familles comprennent :
- des institutions sociales de prévoyance et d'entraide (institutions de retraites, les sociétés de secours mutuels)
- les activités sociales et culturelles tendant à l'amélioration des conditions de bien-être (les cantines, les coopératives de consommation, les logements, les jardins ouvriers, les crèches, les colonies de vacances)
- les activités sociales et culturelles ayant pour objet l'utilisation des loisirs et l'organisation sportive
- les institutions d'ordre professionnel ou éducatif attachées à l'entreprise ou dépendant d'elle (les centres d'apprentissage, les bibliothèques, les cercles d'études, les cours de culture générale et d'enseignement ménager)
- les services sociaux chargés de veiller au bien-être du travailleur dans l'entreprise, de faciliter son adaptation au travail et de collaborer avec le service médical de l'entreprise et de coordonner et de promouvoir les réalisations sociales décidées par le comité d'entreprise et par le chef d'entreprise
- le service médical institué par l'entreprise

Cette énumération n'est pas limitative et le comité d'entreprise a la faculté de créer toute activité dès lors qu'elle revêt un caractère social ou culturel.


B. Le rôle du comité d’entreprise allemand.

Le comité d’entreprise allemand bénéficie d’un rôle beaucoup plus important que son homologue français. Ceci, bien sûr, est dû en partie à sa culture. En effet, Les notions d'ordre, de pouvoir et de cloisonnement sont très fortes. Par conséquent, le respect de la hiérarchie dans les prises de décision même de peu d’importance est primordial. De plus, les Allemands sont très exigeants, méticuleux, courtois et donne une grande valeur au travail. La communauté étant très importante, ils ont beaucoup plus tendance à se regrouper que les français.
Par conséquent, le comité d’entreprise est mieux perçu par les employeurs allemands que par les employeurs français. De même, le chef d’entreprise n’est pas distingué à priori comme un adversaire.
Le comité d’entreprise est constitué des élus du personnel. Le chef d’entreprise et les syndicats n’en font pas partie. Cette institution représentative du personnel est un organe de concertation et de co-gestion dans de nombreux domaines pour lesquels le chef d’entreprise doit lui apporter des informations et prendre son avis : domaine économique, financier, professionnel. Le comité d’entreprise allemand n’a pas de rôle social, mais uniquement économique. Il ne dispose d’aucun budget. Tout est payé par l’entreprise.

Les missions de comité d’entreprise allemand sont donc très différentes du comité d’entreprise français :
- il peut négocier les conventions collectives pour les améliorer au sein de l’entreprise.
Par exemple, si les syndicats obtiennent du patronat une augmentation de salaire de 1%, le comité d’entreprise peut négocier une plus forte augmentation valable seulement pour l’entreprise
- le comité d’entreprise co-gère l’entreprise. Ainsi, son avis est obligatoire dans plusieurs domaines, et sans son approbation la décision est invalidée.
Par exemple, lors d’une embauche, le comité d’entreprise évalue également la candidature de chaque postulant et approuve ou non l’embauche

Pour jouer pleinement son rôle, le comité d’entreprise allemand bénéficie de plusieurs droits :
- Le droit d’information : le chef d’entreprise est obligé d’informer le CE sur la réalisation de ses missions, pour le personnel et les questions économiques
- Le droit d’écoute : le chef d’entreprise est obligé de consulter son comité pour toutes décision importante. En cas de refus de la part du CE, la décision est rendue par les prud’hommes.
- Le droit de conseil : c’est la suite du droit d’information. Le CE donne son avis et préconise des solutions sur la protection du travail et sur les décisions qui concernent l’entreprise. Le conseil est « pour indication » et le chef d’entreprise n’a pas l’obligation de suivre à la lettre les recommandations du CE.
- Le droit à la cogestion : c’est le droit qui donne le plus d’influence au CE en Allemagne. La mesure que doit prendre un chef d’entreprise ne sera valable que si le CE a donné son accord. Cela concerne principalement les mesures sociales (horaires, pauses, augmentation ou diminution du temps de travail…). Si le CE et le chef d’entreprise ne parviennent pas à un accord, une commission composée de membres de la direction et du CE doit décider.
- Le droit d’approbation : il oblige le chef d’entreprise à consulter le CE pour les embauches et les mutations, les regroupements d’entreprise ou la cession d’actifs.
- Le droit d’initiative : sur le licenciement d’un chef d’entreprise incompétent, sur les offres d’emploi, sur l’exigence de formation. La direction et le CE se réunissent pour trouver un accord sur ces points.

Le CE doit enfin vérifier que le chef d’entreprise respecte bien les lois, les prescriptions, la sécurité des salariés, les conventions collectives et les règles internes à l’entreprise.

De par leur rôle bien distinct, le comité d’entreprise allemand joue un rôle moteur dans l’entreprise puisqu’il dispose de prérogatives plus importantes. En effet, grâce au pouvoir de régulation que les salariés ont par le biais de leur comité d’entreprise, mais également par la souplesse introduite dans les négociations, le modèle de la représentation salariale semble donner l’impression d’une participation active à la vie économique.
Face aux enjeux, chacun est conscient que l’objectif est de préserver l’outil de travail et de faire progresser l’entreprise sous toutes ses formes. Les salariés sont conscients des enjeux économiques, sensibilisés à la notion de concurrence et intègrent ces paramètres dans leur revendication. L’impossible n’est jamais demandé pour se résoudre finalement à n’obtenir que la moitié ou le tiers de leurs revendications.

Comme c’est le cas dans de nombreux champs pour lesquels la société allemandes doit se prononcer, le pragmatisme est de rigueur, l’objectif est d’avancer ensemble.

La culture française est beaucoup moins bénéfique au système économique. Par conséquent, le comité d’entreprise français est un frein au développement de l’entreprise. Depuis la loi de modernisation sociale (Janvier 2002), le CE français voit son champ d’action s’élargir, en effet, en cas de compression ou de restructuration de l’effectif, le CE peut non seulement donner son avis, mais aussi formuler des propositions alternatives au projet du chef d’entreprise.
La loi prévoit que le CE peut exercer « un droit d’opposition » aux projets selon les modalités prévues à l’article L433-1, nouveau code du travail ;


II. Les Avantages et Inconvénients du Comité d’Entreprise (C.E.) Français.

                  A. Les avantages.
           a. Il dispose d’une personnalité civile

Dans un premier temps, il est nécessaire d’évoquer le fait que le C.E. français dispose d’une personnalité civile.
Selon l’article L. 431-6 du code du travail, « le comité d’entreprise est doté de la personnalité civile et gère son patrimoine. »

La personnalité civile signifie la capacité pour un groupement d’exister et d’agir comme une personne physique. Elle est reconnue soit par la loi, soit par la jurisprudence.
En réalité, la personnalité civile est constatée et non octroyé. Peu importe en fait que la loi la reconnaisse ou pas car la personnalité civile est un état que l’on constate d’après des critères, même si la loi est muette sur ce point.

La cour de cassation à jugé en effet dans un important arrêt de principe du 28 février 1954 que : « la personnalité civile n’est pas une création de la loi ; elle appartient, en principe, à tout groupement pourvu d’une possibilité d’expression collective pour la défense d’intérêts licites, dignes, par suite, d’être juridiquement reconnus et protégés ; si le législateur, a le pouvoir dans un but de haute police, de priver de la personnalité civile telle catégorie déterminée de groupements, il en reconnaît, au contraire, implicitement mais nécessairement l’existence en faveur d’organismes crées par la loi elle-même avec mission de gérer certains intérêts collectifs présentant ainsi le caractère de droits susceptibles d’être déduits en justices. »

Cet arrêt rendu à propos des comités d’établissements, a une portée très générale, valable pour tous les groupements. Il en résulte que, dès lors qu’un groupement a une possibilité d’expression collective et ne s’est pas vu retirer la personnalité civile par une loi, il possède de plein droit cette personnalité, ce qui est le cas du comité d’entreprise.

Les comités d’entreprise disposent de cette personnalité civile avec tous ces attributs, tant dans le domaine économique que dans le domaine social et culturel. Les attributs de la personnalité civile sont ceux de toutes les personnes morales à savoir ;
ester en justice (action ; intervention ; ou défense en justice) ;
posséder et gérer son patrimoine ;
recevoir des dons ;
contracter et s’engager…

  b.  Il peut agir en justice

Ainsi, un des avantages du comité d’entreprise est de disposer d’une personnalité civile. Ce qui lui donne la possibilité d’agir en justice, par l’intermédiaire d’un mandataire. Cependant, il doit avoir un intérêt à agir en raison de préjudice causé par l’acte critiqué et en raison de la mission qui lui est dévolue par la loi et de l’entreprise où il exerce son acticité. Le comité d’entreprise en tant que personne civile, a des intérêts personnels à défendre. Son patrimoine, son fonctionnement, ses prérogatives peuvent être lésés par un acte. Dans ce cas, il peut utiliser les voies judiciaires pour les défendre. Il doit malgré tout montré que son intérêt à agir est légitime, personnel et direct.

Dans un premier temps, il est important de souligner que Le comité d’entreprise peut s’adresser au Tribunal de Grande Instance dans diverses circonstances :
1. comme créancier de l’employeur, pour demander la paiement de sommes dues au titre de la subvention de fonctionnement de 0,2% de la masse salariale, ou de la contribution aux activités sociales et culturelles, ou pour demander le respect d’un engagement de l’employeur à l’égard du comité lui-même ;
2. comme attributaire légal de l’obligation d’informer et de consulter sur la marche générale de l’entreprise, par exemple pour demander la remise de certains documents ou encore la tenue d’une nouvelle réunion (en cas d’urgence, ou de dommage imminent, ou de trouble manifestement illicite, le comité peut dans tous les cas saisir en référé le Président du Tribunal de Grande Instance) ;
3. comme contractant, le comité peut demander l’exécution des obligations du co-contractant et/ou des dommages - intérêts pour le préjudice subi. Le co-contractant peut être un fournisseur, un salarié usager des activités sociales ou même l’employeur. Certains contrats de fourniture ou de maintenance attribuent compétences au tribunal de commerce. Mais une telle clause doit être spécifiée da manière « très apparente » (article 48 N.C.P.C.)
4. Le comité d’entreprise peut aussi avoir subi un préjudice matériel ou moral du fait des agissements d’un tiers te lui réclamer réparation. C’est le cas par exemple si des biens appartenant au comité ont subi des dégâts à la suite d’un accident. Etc.


Dans un second temps, on peut exposé le fait que le comité d’entreprise peut agir devant le Tribunal de commerce. En effet, différentes interventions du comité devant le Tribunal de commerce sont prévues (par la loi n° 84-148 du 1er mars 1984 et la loi n ° 85-98 du 25 janvier 1985 et leur décret d’application) sur les difficultés des entreprises et sur le redressement et la liquidation judiciaire des entreprises. Ces lois vont plus loin et donne au comité d’entreprise un rôle de prévention économique dans l’intérêt de l’ensemble du personnel.
De plus, la jurisprudence antérieure à ces lois admettait déjà l’intervention du comité d’entreprise devant le Tribunal de Commerce pour la défense de ses propres intérêts, en tant que propriétaire ou gestionnaire d’œuvres sociales mises en péril.

Dans un troisième temps, on peut évoqué le fait que le comité d’entreprise peut agir en justice devant la juridiction pénale. Notamment en cas de délit d’entrave au fonctionnement du comité d’entreprise, celui-ci peut soit porter plainte avec constitution de partie civile, soit se constituer partie civile intervenante en cas de poursuites pénales à la suite d’un procès-verbal de l’inspecteur du travail ou d’une initiative d’un syndicat. Il peut aussi citer directement en correctionnel l’auteur de délit d’entrave, même s’il s’agit du P.D.G. de la société employeur.
La cour de cassation a jugé en effet que « tout délit d’entrave au fonctionnement régulier d’un comité d’entreprise cause nécessairement à ce comité un préjudice direct dont il est fondé à obtenir réparation ».

Le comité d’entreprise comme toute les personnes physiques ou morales, peut après délibération (ou même le secrétaire du C.E. à titre personnel) porter plainte par simple lettre au Procureur de la République, sans se constituer partie civile, s’il vient à connaître un délit quelconque commis par une personne dénommée ou inconnue. Il n’est pas nécessaire, à cet égard, que l’infraction ait un rapport avec les activités ou les attributions du comité d’entreprise. Il peut également porter plainte avec constitution de partie civile contre toute personne physique ou toute société s’il a personnellement souffert du dommage causé directement par l’infraction. Cette infraction peut consister en une violation de la loi sur les sociétés.

Enfin, il nous paraît essentiel de noter que le comité d’entreprise peut agir devant la juridiction administrative. En effet, il peut introduire devant la juridiction administrative un recours pour excès de pouvoir contre une décision administrative irrégulière qui lèse ses intérêts ou les intérêts qu’il a pour mission de défendre.
La jurisprudence administrative admet qu’un comité d’entreprise puisse critiquer tout acte administratif lésant les intérêts économiques du personnel de l’entreprise. Le succès au recours, quant au fond, dépend bien entendu de la pertinence des arguments relatifs à l’illégalité de l’acte critiqué.
c. L’obligation des réunions

Selon l’article L. 434-3 du code du travail, « dans les entreprises dont l’effectif est au moins égal à cent cinquante salariés, le comité se réunit au moins une fois par mois sur convocation du chef d’entreprise ou de son représentant. Dans les entreprises dont l’effectif est inférieur à cent cinquante salariés, et sauf dans le cas où le chef d’établissement a opté pour l’application des dispositions de l’article L. 431-1-1, le comité d’entreprise se réunit au moins une fois tous les deux mois. Le comité peut en outre, tenir une seconde réunion à la demande de la majorité de ses membres. »

Le réunion mensuelle (ou une fois tous les deux mois pour les entreprises de moins de 150 salariés) du comité d’entreprise est une obligation d’ordre public. Aucun accord ne peut valablement y déroger, sauf pour rendre les réunions plus fréquentes. La simple inobservation de la périodicité mensuelle constitue un délit d’entrave. L’employeur poursuivi doit être condamné, même s’il invoque par exemple le fait que traditionnellement, aucune réunion n’a lieu pendant les mois de juillet ou août.
En revanche, un report d’un mois motivé par le déménagement de l’entreprise a été admis.

Ainsi, le comité d’entreprise doit être informé au minimum, généralement consulté dans une multitude de domaines, avant que le chef d’entreprise ne prenne sa décision définitive. Il est consulté en cas de projet comme par exemple :
une modification de la durée du travail ou de son organisation ;
une introduction de nouvelles technologies ;
un licenciement collectif pour motif économique ;
une modification du règlement intérieur ;
un licenciement des représentants élus du personnel, etc. ;
et plus généralement pour toute décision visant la collectivité des salariés, y compris la signature ou la dénonciation d’un accord collectif.

Ainsi, ceci constitue un avantage pour le comité d’entreprise qui est informé sur tous les projets de l’entreprise pour tout ce qui n’est pas inhérent à la collectivité des salariés. Ce qui lui permet d’avoir une bonne visibilité sur les activités et les actions de l’employeur vis-à-vis des salariés.
d. le droit d’alerte : une prérogative du comité d’entreprise (article L. 432-5 du code du travail).

Le Comité d’entreprise peut déclencher un droit d’alerte quand « il a connaissance de faits de nature à affecter de manière préoccupante la situation économique de l’entreprise » (article L. 432-5 du code du travail), ce qui lui ouvre un large domaine d’intervention dans la mesure où le caractère préoccupant des faits est laissé à son appréciation : le fondement du droit d’alerte du comité d’entreprise est la crainte légitime, davantage que le risque immédiat d’ordre financier.

Le critère de mise en œuvre de la procédure est donc plus large que celui qui est retenu pour les commissaires aux comptes et pour le Tribunal de Commerce. Il n’implique pas forcément des faits de nature à rompre la continuité de l’exploitation mais seulement susceptibles de susciter une inquiétude sur l’évolution de l’entreprise.

La formule prévue par l’article L. 432-5 du Code du Travail, générale, permet, au-delà d’éléments strictement comptables, d’englober toutes sortes d’indices de nature à susciter une inquiétude ; il peut s’agir par exemple de la perte de marchés, d’un endettement excessif, d’une inadaptation des produits de l’entreprise aux besoins de la clientèle.

Cela peut concerner également des mesures de restructuration et des suppressions d’emplois ; dans de nombreux cas, la procédure d’alerte déclenchée par le Comité d’Entreprise précède des plans sociaux, quels que soient par ailleurs la situation financière de l’entreprise et ses problèmes de trésorerie.

Le Comité d’Entreprise déclenche le droit d’alerte en demandant à l’employeur de lui fournir des explications sur ces faits, qui doivent être énoncés. La direction doit répondre à cette demande (un refus pouvant être assimilé à un délit d’entrave) dans le cadre général de l’information du C.E. (réponse précise et écrite, mais la loi n’indique pas de délai).

Si cette réponse ne satisfait pas le Comité, ou si elle le conforte dans ses inquiétudes, il vote la poursuite de la procédure et, s’il le souhaite, l’assistance d’un expert-comptable dont le coût est à la charge de l’entreprise (dans la limite toutefois d’une fois par exercice).

La procédure se poursuit par la rédaction d’un rapport analysant les différents aspects du problème et des réponses apportées (ou non). Ce rapport, en principe rédigé par le Comité d’Entreprise, ou la commission économique lorsqu’elle existe, est présenté à une deuxième réunion de C.E., l’expert-comptable nommé étant présent.

Destiné à l’employeur, il est également souhaitable que le rapport d’alerte soit adressé aux commissaires aux comptes, ce qui permet de procéder à des échanges d’informations entre les deux principaux acteurs de la procédure d’alerte. Un vote est à nouveau nécessaire pour décider d’une saisine éventuelle de l’organe d’administration, de surveillance, ou éventuellement des actionnaires ; l’avis de l’expert-comptable est joint à ce vote. Le C.E. doit recevoir une réponse motivée dans le mois qui suit la délibération de l’organe d’administration.

B. Les inconvénients
a. Un pouvoir consultatif

Nous avons vu précédemment que le comité d’entreprise doit être informé voir consulté avant qu’une décision sur un projet soit définitivement adoptée par l’employeur.
Ainsi, le comité d’entreprise n’a qu’un rôle consultatif sur les projets de l’entreprise. Il ne peut s’y opposer ou agir en justice lorsque cela ne le concerne pas directement.

Contrairement aux syndicats professionnels, qui eux peuvent agir en justice en invoquant un préjudice direct ou indirect collectif de la profession, le comité d’entreprise lui doit invoquer un préjudice personnel et direct.

Par exemple, si le comité d’entreprise porte plainte avec constitution de partie civile  contre des dirigeants de sociétés pour délit d’usage abusif de pouvoirs ou de voix, délit réprimé par la loi sur les sociétés, la cour de cassation jugera que dans ce cas, que les faits dénoncés ne pourront causer un préjudice direct qu’à la société elle-même et qu’il n’est pas allégué qu’une atteinte soit portée aux prérogatives légales du comité d’entreprise.
                                                                                                                 
De plus, selon la juridiction judiciaire, le comité d’entreprise ne peut pas représenter en justice les intérêts de l’ensemble du personnel de l’entreprise, mais seulement ses propres intérêts (prérogatives, patrimoine, etc.).

Aussi, même  s’il y a intérêt, il ne peut pas :
demander l’annulation d’un accord collectif signé entre l’employeur et les syndicats dans le cadre de la négociation annuelle sur les salaires ;
demander à un tribunal de se prononcer sur la force exécutoire d’un engagement unilatéral de l’employeur, ayant trait au paiement de certaines heures de travail au personnel de l’entreprise, même si cet engagement a été pris au cours d’une séance du comité d’entreprise.
                                                                                                                                                                     
  b. pas de pouvoir de négociation

Le comité d’entreprise n’est pas une instance de négociation, sauf cas particulier, même si des négociations s’y trouvent parfois amorcées. Il ne peut pas se substituer aux syndicats ; et un employeur ne peut pas légalement faire jouer au comité le rôle d’un syndicat.
La loi et la jurisprudence distinguent nettement les syndicats et les comités d’entreprise.

La Cour de cassation a jugé plusieurs fois qu’un comité d’entreprise n’a pas pour mission de représenter les différentes catégories du personnel ni les intérêts généraux de la profession, contrairement aux syndicats, ni les intérêts individuels des salariés.
A la différence des syndicats, le comité d’entreprise ne peut pas se constituer de partie civile s’il na pas subi de préjudice personnel et direct.

Ainsi, le droit de négocier et de signer des accords collectifs de travail applicables à tous les salariés est réservé en France aux organisations syndicales représentatives.
S’il le fait, l’accord en question n’a pas légalement la qualité et les effets d’un accord collectif au sens des articles 132-2 et suivants du code du travail, sauf exception législative.
En revanche, les accords signés avec les syndicats peuvent concerner les comités d’entreprise.

Le comité d’entreprise n’a donc pas cette prérogative. Son rôle est d’assurer une expression collective des salariés dans le cadre de sa mission de contrôle économique, mais « sans préjudice » des droits syndicaux et sans pouvoir de négociation sur les droits des travailleurs. Si le comité conclut avec l’employeur un accord relatif à ses propres attributions, cet accord est un accord de droit commun, qui ne peut réduire les droits que le comité tient de la loi ou d’une convention collective, ou d’un accord collectif d’entreprise signé avec les syndicats.

Ainsi, on a pu voir que le comité d’entreprise n’a aucun pouvoir de décision quant à la collectivité des salariés. Il n’a pas le pouvoir de négocier et de signer des accords collectifs. La seule obligation pour l’employeur est de l’informer et le consulter avant de prendre une décision, sur les projets de caractère économique, professionnel ou social. C’est un principe de base de la législation sur les comités d’entreprise.

En droit, il n’existe en France ni « cogestion » des entreprises, ni « participation » à leur gestion. Toute cogestion supposant un partage des pouvoirs de gestion, on ne peut pas évidemment baptiser « cogestion » la représentation du comité d’entreprise au conseil d’administration ou de surveillance des sociétés, ou l’élection d’administrateurs salariés offerte par les statuts d’une société, ou la représentation minoritaire du personnel au conseil d’administration des entreprises nationalisées et encore moins une simple participation aux résultats de l’entreprise.
Depuis l’origine, les attributions des comités d’entreprises dans le domaine  économique et professionnel sont et demeurent purement consultatives. Le comité d’entreprise doit être informé et consulté très souvent.


III. Les Avantages et inconvénients du Comité d’Entreprise allemand.

A. Les avantages
a. De la consultation à la codécision: la concertation
Généralement, la participation des travailleurs au sein des comités ou conseils d'entreprise va de l'information qui leur est fournie à la consultation qui leur est demandée sur les sujets les plus divers. Il peut s’agir aussi bien de simples questions techniques que de problèmes de politique du personnel (œuvres sociales et bien-être, horaires de travail, pauses, plans de congés, système de rémunération, formation professionnelle, introduction de nouvelles technologies, réductions d'effectifs, etc.). Dans les cas où les décisions peuvent avoir un effet négatif sur le personnel, l'employeur doit indiquer les mesures qu'il compte prendre pour prévenir ou atténuer ces conséquences, et le comité ou le conseil peuvent suggérer leurs propres solutions
L'information doit normalement s'étendre à la situation économique et sociale de l'entreprise ainsi qu'aux perspectives d'emploi et aux changements envisagés, ce qui implique que des informations toujours plus détaillées soient demandées par rapport aux investissements prévus ou réalisés. L’ensemble de ces informations donne des éléments très utiles pour la négociation collective.
L’Allemagne, a ajouté depuis des années dans sa législation un certain nombre de droits de codécision portant essentiellement sur des questions sociales et de personnel.
b. Le pouvoir de codécision
L'Allemagne est le seul pays qui a organisé les deux formes de participation des salariés à la gestion des entreprises : des représentants du personnel siègent au conseil de surveillance des sociétés les plus importantes et les comités d'établissement disposent de réels pouvoirs de codécision.
En Allemagne, chaque établissement autonome comptant au moins cinq salariés doit constituer un conseil d'établissement, qui est composé uniquement de représentants élus par les salariés. Dans les affaires que la loi qualifie de " sociales ", et qui regroupent surtout les questions relatives à l'organisation du travail, aux rémunérations et à la gestion des oeuvres sociales, l'employeur ne peut prendre aucune décision sans l'accord exprès du conseil. En cas de désaccord, la décision finale appartient à un organe paritaire constitué dans l'établissement, la commission interne de conciliation.

En cas de désaccord entre l'employeur et le comité d'entreprise, la commission de conciliation paritaire, instituée par le Conseil économique et social et compétente pour la branche d'activité concernée, tente de trouver une solution amiable. Si elle n'y parvient pas, elle peut saisir le tribunal de première instance.
c. Un dialogue social fort entre les représentants du personnel et la direction
En Allemagne l'apparition de conflits sociaux est largement limitée par l'intensité, la permanence et la qualité du dialogue entre les représentations syndicales, les représentants du personnel et les directions d'entreprise.

En ce qui concerne les décisions prises dans les entreprises
En Allemagne, les principales décisions des entreprises sont souvent prises en accord avec les salariés. Cette situation découle de la représentation accordée aux organisations syndicales dans les organes de direction. Ainsi, les syndicats sont-ils représentés au conseil de surveillance des sociétés de capitaux de plus de 500 salariés, grâce au principe de codécision entre employeurs et employés. Pour les entreprises ayant entre 500 et 2 000 employés, les représentants du personnel disposent d'un tiers des mandats du conseil de surveillance, et, dans les entreprises de plus de 2 000 salariés, de la moitié des mandats.
Parmi les mandats détenus par les représentants du personnel, un quart à un tiers est attribué aux syndicats. Les membres des conseils d'établissement, ils sont des salariés délégués élus par le personnel. Un très grand nombre d'entre eux sont également membres d'un syndicat. Ainsi, dans les deux tiers des entreprises allemandes, la majorité du conseil d'établissement serait détenue par des salariés membres des syndicats. Or, le conseil d'établissement, qui est obligatoire dans toute entreprise comptant au moins cinq salariés, dispose de droits étendus, allant, selon les cas, de la simple information au conseil jusqu'à la codécision, pour ce qui concerne, par exemple, les décisions concernant le personnel.
Le cas du droit de grève
Il s'ensuit que les représentations syndicales disposent, à travers de ces mécanismes de cogestion, de larges moyens d'infléchir le fonctionnement d'une entreprise et, par voie de conséquence, d'empêcher les conflits. La grève n'est plus, dans ces conditions, qu'un ultime recours. Cela explique par ailleurs l'encadrement strict du droit de grève, les salariés pouvant, au travers de ce système de cogestion, largement exprimer leur point de vue.
Le dialogue social est d'autant plus harmonieux que les syndicats appartiennent tous à la même confédération, la DGB, et peuvent ainsi fédérer leurs revendications.
d. La possibilité de contestation en justice
En Allemagne, le comité d'établissement doit être consulté avant toute embauche, toute mutation (dans les entreprises de plus de vingt salariés) et avant tout licenciement. Dans certaines circonstances, par exemple lorsqu'un recrutement ne respecte pas les critères de sélection utilisés dans l'entreprise ou lorsqu'un licenciement pourrait être évité grâce à la modification de certaines clauses du contrat de travail, il peut s'opposer à la mesure envisagée. L'affaire peut alors être portée devant les tribunaux.


- la loi du 4 mai 1976 sur la codécision des salariés instaure également pour les sociétés de plus de 2.000 salariés un modèle paritaire, tout en réservant aux cadres supérieurs un siège parmi ceux qui reviennent aux salariés.
e. Mener à bien la négociation collective
En Allemagne, grâce à la place que l’on donne aux négociations entre les représentants du personnel et les directions des entreprises, on peut éviter les affrontements et arriver à des compromis non seulement grâce à des concessions réciproques, mais également en mettant en œuvre une sorte de négociation informelle, donnant, donnant. Un accord est quelquefois obtenu en échange d'un renoncement portant sur une autre question ou sur un point qui sera débattu ultérieurement.

B. Les inconvénients
a. Une conversion difficile au management
Le rôle des membres des comités d’entreprises étant assez varié, des sessions de formation spéciale sont dispensés. La formation porte sur des notions économiques de base et prépare à l'analyse des bilans, mais elle est généralement de durée bien limitée, et il est difficile de convertir les représentants du personnel en managers professionnels. On peut cependant les catégoriser en fonction de leurs compétences ; il est également très important de recourir à des spécialistes, soit appartenant à l'entreprise, soit venant de l'extérieur. Cette division du travail peut s'avérer très efficace si l'on veut éviter que les réunions se soldent par des approbations rapides et de pure forme. Les travailleurs disposent tout de même d'un atout à ne pas négliger, la connaissance de l'entreprise par l'intérieur, que même les représentants des actionnaires ne possèdent pas toujours.
b. L'information au compte-gouttes et les décisions en petit comité.
Toutes les mesures importantes de nature économique, financière ou technique intervenant au sein des organes dirigeants, et dont les conséquences, sociales plus particulièrement, intéressent au plus haut point les travailleurs, doivent faire l'objet d'un débat avant la prise de décisions lorsqu’il est encore temps de les influencer, de les orienter, voire d'obtenir qu'il y soit renoncé. Dans ce contexte, les directions ne fournissent souvent que le strict minimum d'informations afin de garder la maîtrise des décisions. Parfois, ces décisions, qui peuvent porter par exemple sur d'importants investissements, ne sont pas même soumises au conseil d'administration ou de surveillance. Les cas ne sont pas rares où les décisions sont en fait préparées au cours de rencontres non officielles auxquelles les instances représentatives ne sont pas conviées.
c. Par rapport aux accords de branches

Le pouvoir de régulation sociale délégué au comité d’entreprise allemand est la garantie d'une résolution négociée des conflits, mais il signifie aussi beaucoup de rigidité bureaucratique. En effet, il est étroitement lié aux accords de "branche", qui définissent horaires de travail et salaire minimum.
Ces accords sont essentiels pour aligner les conditions de travail dans des entreprises en situation de concurrence.
Il faut donc des instances représentatives (syndicats, élus du comités) puissantes et représentatives. Aujourd'hui, en Allemagne, ce système est en perte de vitesse, en particulier dans les petites et moyennes entreprises ou les employeurs dénoncent les accords de branche et négocient directement avec leur comité d’établissement dans l'entreprise.

d. La grève
En Allemagne, un conseil d'établissement considéré comme un organisme de coopération n'a pas le droit de déclencher une grève pour essayer d'imposer son point de vue.

Les grandes et rares grèves générales en Allemagne concernaient les millions de salariés dans leurs "branches", à travers tout le pays. Ces grèves ont été déclenchées car les salariés ne savent plus comment négocier face à une menace de délocalisation.

e. Le cas IGM

Le fameux dialogue social allemand est envié par les dirigeants hexagonaux, qu’ils soient à la tête d’entreprises publiques ou privées. Outre-Rhin, c’est connu, aucun conflit ne dégénère. C’est un pays où la grève est quasi inexistante, où l’on a un sens poussé de la négociation, où patrons et syndicalistes sont capables de s’asseoir à la même table, de discuter et de trouver un accord entre gens raisonnables.

Mais une affaire a terni cette image de paix sociale. L’affaire réunit IG Metall, un syndicat de la métallurgie et Volkswagen, le premier employeur du secteur. Un Directeur des Ressources Humaines, Peter Hartz qui, selon la presse allemande, aurait été bien au-delà de la simple négociation sociale avec Klaus Volkert, président du comité d’entreprise du groupe et membre important du syndicat. Le responsable du comité d’entreprise, aurait fait payer des dépenses personnelles par les ressources humaines sans qu’aucun justificatif n’ait à être présenté. Il aurait également profité des largesses en nature de l’entreprise qui lui aurait réservé des suites dans des palaces internationaux où le syndicaliste passait des week-ends. Pour s’y rendre, il pouvait user du jet privé de l’entreprise. Klaus Volkert serait également à la tête d’une société prestataire de service de Skoda, la filiale tchèque du constructeur allemand. Une entreprise qu’il aurait créée avec un ami à lui, qui n’est autre que Helmut Schuster, l’ancien DRH de Skoda.
Depuis ces révélations, Klaus Volkert a démissionné de ses différents postes et toutes les têtes allemandes se tournent désormais vers Peter Hartz, tout puissant DRH du groupe VW (Volkswagen) et accusé par la presse d’avoir acheté la paix sociale dans son entreprise et dans tout le pays, puisqu’il est également conseiller social auprès de Gerhard Schröder. Un homme qui milite tellement fort pour le mélange des genres qu’il a fait nommer Klaus Volkert au comité de direction du groupe et qu’il a lui-même pris sa carte à IG Metall, comme 97% des salariés du constructeur. L’homme a tout de même fini par offrir sa démission au PDG de VW.
La négociation collective ne se déroule donc peut-être pas toujours autour d’une table, entre gens défendant leurs convictions d’un côté et leur entreprise de l’autre. Bien sûr ce n’est pas une généralité, mais cette épisode risque d’éveiller des soupçons.

IV. Le licenciement économique

A. Qu’est-ce que le licenciement économique ?
Il se distingue des autres types de licenciements. Il est en effet effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié. Il est donc à différencier du licenciement pour motif personnel.

Pour être considéré comme économique, le licenciement doit résulter d'une suppression, d'une transformation d'emploi ou encore de la modification substantielle du contrat de travail qui doivent être consécutifs "notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques" (article L.321-1 du Code du travail). Les départs volontaires et les ruptures négociées sont aussi assimilés à des licenciements économiques lorsque leur cause est économique.
A l'inverse, la volonté de faire un bénéfice plus important, la perte d'un marché, ou encore le ralentissement des ventes ne constituent pas une cause réelle et sérieuse pour l'entreprise de licencier un salarié pour motif économique.

La réglementation française

Le droit du travail prévoit différentes obligations pour l'employeur selon la taille de l'entreprise et le nombre de salariés. Dans tous les cas, il doit respecter l'ordre des licenciements en fonction de critères fixés par la convention collective ou par lui-même après consultation des représentants du personnel.
Les salariés licenciés pour motif économique ont des droits plus étendus que les salariés licenciés pour motif personnel. Et si les conventions de conversion ont disparu le 30 juin 2001, la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002 a institué un droit au reclassement. De plus, les salariés licenciés pour motif économique peuvent bénéficier d'une priorité de réembauchage pendant un an s'ils en font la demande.
Pendant l'année qui suit la rupture du contrat de travail, l'employeur doit informer son ancien salarié des postes disponibles et correspondant à sa qualification.

La réglementation allemande

Les licenciements en Allemagne sont principalement encadrés par la Loi relative à la protection des salariés contre le congédiement et par les pratiques en matières de cogestion. La législation impose des limites aux licenciements qui peuvent être effectués par une entreprise. Par exemple, pour une entreprise comptant entre 20 et 50 employés, le seuil est de 5 licenciements par mois. Une entreprise qui désire licencier un nombre de travailleurs supérieur doit en aviser le conseil d’entreprise, l’Office local du travail et justifier les licenciements.

B. La directive européenne

La directive européenne sur l’information et la consultation des travailleurs, adoptée en décembre 2001, impose le respect de certaines règles en cas de licenciement collectif.

A la demande des Etats membres de l’Union Européenne disposant d’une forte culture de négociation collective, la directive prévoit la possibilité de confier aux partenaires sociaux le soin de définir librement et à tout moment par voie d’accords négociés les modalités d’information et de consultation des travailleurs, dans le respect de la directive.

En France, il n’est pas nécessaire d’aboutir à un accord, contrairement à l’esprit de la nouvelle directive. Alors que l’accord est obligatoire en Allemagne sur le contenu du plan social.

C. Procédures


Reclasser ou indemniser sont les deux grandes options qui différencient les procédures allemandes et françaises. La loi française est très directement axée sur le reclassement des personnels. Elle oblige l’employeur à proposer, avant de licencier, des mesures précises de reclassement interne et de réduction du temps de travail.

En Allemagne comme en France, le licenciement est impossible s’il existe des possibilités d’emploi interne. Dans le cas allemand, le reclassement externe est l’affaire de l’Office de l’emploi et de l’indemnisation du chômage, un organisme financé par un prélèvement obligatoire. De grandes entreprises ont d’ailleurs créé des sociétés de “promotion de l’emploi” afin de favoriser le retour à l’emploi des salariés licenciés. En Allemagne, le minimum (indemnité et préavis) est de 18 mois de salaire pour 20 ans d’ancienneté.

L’administration peut retarder la procédure sans modifier le contenu du plan social en Allemagne, ou au contraire l’accélérer et jouer un rôle de censeur, comme en France, où l’inspecteur du travail a pouvoir de dresser un constat de carence. Lorsque les choses se passent bien, les délais de procédure tournent partout autour d’un trimestre. Mais la réalité du fait des possibilités de recours, de contentieux, d’intervention administrative ou d’appel au médiateur, la procédure est plus longue. En Allemagne, la menace d’un recours constitue souvent une arme de dissuasion pour les salariés. Les sanctions sont généralement lourdes lorsque le bien-fondé de l’action est reconnu.

CONCLUSION :
En France, les représentants du personnel semblent être pour la plupart imperméables à toute idée de révision négociée des acquis. Les représentants du personnel et les directions d’entreprise se concertent au moment où ils arrivent à une impasse.
Sur le point du dialogue, l’Allemagne est un exemple. Mais son système connaît des difficultés d’ordre économique qui affaiblissent les instances représentatives.
Les syndicats allemands sont affaiblis, après avoir perdu 15% de leurs membres en 10 ans, les organisations syndicales allemandes très présentes dans les comités d’entreprises allemands ont subi des revers qui accélèrent leurs difficultés.
Les raisons de cette érosion tiennent notamment aux suppressions d’emplois dans certains  secteurs d’activité (principalement l’automobile), à la tertiarisation de l’économie allemande, mais aussi à ses difficultés à recruter parmi les jeunes et les femmes.
Les responsables syndicaux accusent la montée du chômage et rencontrent un problème avec la modification du tissu économique actuelle : autrefois prédominaient l’industrie et les grandes entreprises. Aujourd’hui se développe le secteur tertiaire. On y trouve une majorité de petites et moyennes entreprises, avec une main d’œuvre plus féminine et surqualifiée du fait de la crise. Cette population se sent en décalage avec le langage, voire la gestuelle, des responsables syndicaux classiques. Leur point faible, ne pas avoir trouvé de réponses aux phénomènes de précarisation des conditions de travail nés de la crise. Ils ont tendance à défendre coûte que coûte le modèle, suranné, de l’ouvrier qualifié qui passe toute sa vie dans la même entreprise. Du coup, ont les accuse de toutes les rigidités, et d’avoir perdu le sens des réalités.
Une majorité d’Allemands considèrent que trop de protections finissent par les accabler de charges, voire mettent en péril leur emploi et leur bien-être. Ils font de moins en moins confiance aux syndicats.
D’après M. Baum (président d’une commission au gouvernement allemand) la cogestion paritaire est un dinosaure voué à disparaître.

1 commentaire:

  1. Merci pour cet article intéressant pour la comparaison avec l'Allemagne ! Au plaisir de vous lire à nouveau.

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