dimanche 8 juillet 2012

LE ROLE DU MEDECIN DU TRAVAIL ET DU CHSCT


Les obligations de l’entreprise en matière de santé au travail
  
L’entreprise a différentes obligations relatives à la santé au travail.

Tout d’abord, elle doit organiser un service de santé au travail. Il existe différents types de services :
-          Les services autonomes qui regroupent les services de santé au travail d’entreprise ou d’établissement et les services de santé au travail inter-établissement.
-          Les services communs à un certain nombre d’entreprises qu’on appelle aussi les services de santé au travail inter-entreprise.

Les services de santé au travail concernent donc les entreprises, mais aussi les établissements et, contrairement au C.H.S.C.T, il n’existe pas un seuil d’effectif pour mettre en place un service de santé au travail.

Quel service de santé au travail ?

Type de services
Constitution possible
Constitution obligatoire
Service de santé au travail d’entreprise
Service de santé au travail d’établissement
Au-delà de 412,5 salariés ou de 400 examens
A partir de 2200 salariés ou de 2134 examens
Service de santé au travail inter-établissement
Au-delà de 412,5 salariés ou de 1600 examens

Service de santé au travail d’entreprise constituant une UES
Au-delà de 1650 salariés ou de 1600 examens

Service de santé au travail de site
A partir de 2200 salariés ou de 2134 examens


Ensuite, il existe une réglementation relative à la médecine du travail. Celle-ci est définie dans un document (signé par l’employeur et le président du service de santé au travail) dans les entreprises de 50 salariés et plus et dans les entreprises de moins de 50 salariés où existe un C.H.S.C.T.
Cette réglementation comporte :
-          Les lieux où s’exerce la surveillance clinique des salariés.
-          Le personnel du service de santé au travail.
-          Le nombre et la catégorie des salariés à surveiller.
-          Les risques professionnels auxquels ils sont exposés.
-          Les réunions du C.H.S.C.T.
-          Les temps dont disposent les médecins pour remplir leur fonction.

Enfin, dans les établissements indépendants occupant au moins 200 salariés et autres établissements occupant au moins 500 salariés, les examens cliniques doivent être effectués dans l’établissement, ce qui nécessite la constitution du matériel nécessaire. 
L’employeur a d’autres obligations qui concernent le C.H.S.C.T.

La constitution d’un C.H.S.C.T est obligatoire dans tous les établissements d’au moins 50 salariés. L’effectif se calcule au niveau de l’établissement. Le chef d’établissement doit fournir au C.H.S.C.T les informations nécessaires à l’exercice de ses missions et doit mettre à sa disposition les moyens destinés à la préparation et à l’organisation des réunions et déplacements imposés par les enquêtes et inspections.

Au moins une fois par an, le chef d’établissement doit également transmettre aux membres du C.H.S.C.T, un rapport écrit faisant le bilan de la situation générale en termes d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail et rappelant les actions ayant contribué, au cours de l’année écoulée, à la protection de la santé, de la sécurité et à l’amélioration des conditions de travail des salariés. Enfin, le chef d’établissement doit présenter au C.H.S.C.T un programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail.

Ces documents doivent être conservés dans l’établissement et tenus à la disposition de l’inspecteur du travail ainsi qu’aux agents des services prévention de la C.R.A.M.

I)   Rôle du médecin au travail

Lorsqu’on évoque le rôle du médecin du travail, trois termes reviennent en permanence : hygiène, sécurité et conditions de travail. Ces domaines doivent donc être omniprésents dans son action au quotidien.

1)   Ses différentes missions au quotidien

Le médecin du travail consacre 1/3 de son temps à sa mission (soit 150 demi-journées par an).
Pour un médecin à temps plein, le nombre maximal d’entreprises suivies est de 450, l’effectif maximal de salariés sous surveillance médicale est fixé à 3300 et le plafond annuel d’examens médicaux est de 3200.
Pour un médecin à temps partiel, on calcule au prorata.

Son champ d’intervention s’articule autour de deux axes :
-          La prévention des risques professionnels
-          L’amélioration des conditions de travail

Ces deux actions sont évidemment très liées puisque la prévention des risques peut entraîner une amélioration des conditions de travail. En effet, lorsqu’un risque professionnel est identifié sur un poste par exemple, il est suivi d’une modification dudit poste entraînant ainsi une amélioration des conditions de travail du salarié.

a) La prévention des risques professionnels

Elle consiste à anticiper les risques professionnels que peuvent courir les salariés de l’entreprise. Pour cela, le médecin du travail procède à plusieurs actions.

Tout d’abord, le suivi médical des salariés : il consiste à « éviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail, notamment en surveillant les conditions d’hygiène du travail, les risques de contagion et l’état de santé des travailleurs. »
Afin d’assurer ce suivi, le médecin du travail doit faire passer plusieurs examens au salarié.
Le premier est évidemment l’examen à l’embauche, réalisé, comme son nom l’indique, lors de l’embauche d’un nouveau salarié. Il a pour but de rechercher si le salarié n’est pas atteint d’une affection dangereuse et s’il est médicalement apte au poste qu’il va occuper. Si c’est le cas, le médecin du travail constitue alors un dossier médical et une fiche médicale d’aptitude.
Le deuxième est l’examen périodique, pratiqué tous les 24 mois. Le médecin du travail s’assure que le salarié est toujours apte à travailler sur son poste. En cas de doute, le médecin peut prescrire des examens complémentaires à effectuer. Le salarié devra alors passer deux examens médicaux espacés de 15 jours calendaires. En cas d’inaptitude, le 2e rôle du médecin entre en action : il devra faire en sorte de trouver une façon d’adapter le poste au nouvel état de santé du salarié avant de le déclarer inapte.
Le troisième et dernier est l’examen de reprise pratiqué en cas d’absence pour cause de maladie professionnelle, absence d’au moins 8 jours pour accident du travail ou d’au moins 21 jours pour maladie ou accident non professionnel, absences répétées.
Toutes ces visites médicales permettent au médecin du travail de constituer un dossier médical pour chaque salarié, suivre et connaître leurs éventuels problèmes de santé.

Ensuite, le médecin du travail a une mission de conseil auprès des différents acteurs de l’entreprise : il conseille le chef d’entreprise, les salariés et notamment les représentants du personnel et des services sociaux en matière d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail.
Il anime également le fonctionnement du service de santé au travail dans le cadre de ses responsabilités techniques.

Enfin, il assure la surveillance de l’hygiène et des conditions de travail et préserve la santé et la sécurité des salariés. Ce rôle rejoint la fonction d’amélioration des conditions de travail puisque c’est grâce à la surveillance quotidienne que le médecin du travail peut améliorer les conditions de travail et les postes des employés.

b) L’amélioration des conditions de travail

Le médecin du travail n’a pas qu’une action de prévention, il possède un pouvoir d’action en matière d’amélioration des conditions de travail. Après avoir déterminé quels sont les risques courus par les salariés, il peut mettre en œuvre des actions de correction ou d’amélioration des conditions de travail.
Il doit faire en sorte d’adapter les postes, les techniques et les rythmes de travail à la physiologie humaine : il apporte ses connaissances médicales à l’employeur afin qu’il assure le meilleur environnement professionnel au salarié.
Il doit également être consulté sur les projets de construction ou d’aménagement nouveaux et sur les modifications apportées aux équipements existants.
Enfin, il assiste, bien évidemment, à titre consultatif, aux réunions du C.H.S.C.T.

Pour l’aider dans ses tâches, le médecin du travail peut faire appel à des experts extérieurs appelés « intervenants en prévention des risques professionnels ». 

c) Activités annexes du médecin du travail

Le médecin du travail, en plus de son activité sur le lieu de travail et de son activité clinique, mène des activités annexes nécessaires au fonctionnement du service de santé au travail ou à l’exercice de ses missions. Ces activités doivent être prises en compte dans l’organisation de sa charge de travail.
Il s’agit notamment de sa participation :
-          dans les services inter-entreprise, aux travaux du conseil d’administration du service, de la commission de contrôle.
-          à la commission médico-technique.
-          à la veille sanitaire en lien avec les situations de travail.
-          aux programmes de santé publique dans le domaine de la prévention des risques professionnels.
-          aux recherches, études et enquêtes, en particulier à caractère épidémiologique hormis celles menées dans le cadre de l’action sur le milieu de travail.

-          aux réunions internes au service.
-          aux réunions sollicitées par les structures externes (médecins inspecteurs, sociétés de médecine du travail) lorsqu’elles ont un lien avec les missions confiées au médecin du travail.

Le médecin du travail s’occupe également :
-          de sa formation continue
-          du tutorat des médecins en formation
-          d’élaborer le rapport annuel d’activité

Pour conclure, sa mission couvre en fait l’ensemble des questions relatives à l’hygiène et à la sécurité des salariés et a pour but essentiel la prévention des accidents et maladies par une meilleure adaptation du milieu de travail à l’homme.

On peut toutefois se poser la question de la charge de travail du médecin du travail et donc de la qualité des actions qui en découle. En effet, le médecin doit suivre chaque salarié de l’entreprise, le connaître, faire des enquêtes sur les différents postes dans l’entreprise, proposer des actions, surveiller l’hygiène et la sécurité des équipements,… Tout cela prend beaucoup de temps (voir la partie « évolution de la fonction de médecin du travail »).
On pourrait comprendre qu’un médecin ne puisse connaître parfaitement l’intégralité des dossiers de tous ses patients par exemple. La qualité de son travail s’en trouve donc amoindrie au fur et à mesure que le nombre de ses dossiers augmente…
Il est donc positif que le médecin du travail ait un rôle important dans l’entreprise mais pas au détriment de la qualité de ses actions.


2) Relation médecin/employeur

Le médecin du travail est un salarié de l’entreprise, cependant il existe une différence notable entre le médecin du travail et un salarié lambda.

a) En matière de contrat de travail

Le médecin du travail est lié à l’employeur par un contrat écrit (ou non) dont le lien de subordination n’est qu’administratif. En effet, si l’employeur peut imposer au médecin le respect des horaires de travail, l’utilisation des locaux et du matériel mis à disposition des services de santé au travail, le contrôle du fonctionnement régulier de ce service, il ne peut s’immiscer dans l’exercice de l’art médical. Le médecin du travail a donc une indépendance médicale et technique.
C’est également un salarié protégé : il ne peut donc être licencié sans l’autorisation de l’inspecteur du travail. De plus, il est tenu au secret professionnel et ne peut divulguer en aucun cas le contenu des dossiers médicaux des salariés à des personnes de l’entreprise. 
  

b) En matière de rémunération

Le Code du Travail est muet quant à la rémunération du médecin du travail : les parties fixent librement la rémunération. Les médecins n’ont donc aucune protection en terme de revenu minimal comme les autres salariés de l’entreprise. En revanche, un médecin ne peut accepter une rémunération fondée sur des normes de productivité, de rendement horaire ou toute autre disposition qui aurait pour conséquence une limitation ou un abandon de son indépendance ou une atteinte à la qualité des soins. Il en est de même pour le contrôle du contenu de l’activité.

c) L’obligation de contrôle de l’employeur

Le médecin du travail et l’employeur travaillent tous les deux en collaboration. Si le médecin du travail exerce des fonctions de prévention et de conseil, l’employeur, lui, effectue des contrôles afin que les obligations en matière de médecine du travail soient respectées :
·               L’employeur est tenu de faire suivre au salarié les différents examens (à l’embauche, périodique, de suivi) sous peine de sanctions pénales. Le refus du salarié constitue cependant une cause réelle et sérieuse de licenciement.

·               La responsabilité de l’employeur peut être engagée dans deux cas :
-          L’inobservation des obligations contenues dans les textes légaux ou réglementaires.
-          Une faute professionnelle d’un préposé ou du fait des « choses que l’on a sous sa garde ».
L’employeur peut donc être responsable d’une faute commise par le médecin du travail car il fait partie des « choses que l’employeur a sous sa garde » tout comme les parents sont tenus responsables des fautes de leur enfant.

  • De même, l’employeur doit veiller au respect des obligations légales en matière d’organisation et de fonctionnement des services de santé au travail.

Le contrôle de l’application de la réglementation de la médecine du travail est confié à l’inspection du travail, en coordination avec l’inspection médicale du travail.

d) Les autres relations du médecin du travail

L’activité du médecin du travail le met en contact avec les différents membres de l’entreprise : la direction, les cadres de l’entreprise, le service du personnel, l’inspection du travail, des intervenants en prévention des risques professionnels, les caisses de sécurité sociale, le médecin traitant choisi par le salarié, des médecins spécialistes et des laboratoires.

Les relations du médecin du travail avec la direction portent essentiellement sur l’équipement et l’organisation administrative des services de santé au travail, sur les conditions de travail dans l’entreprise, sur l’état physique et mental du personnel, son aptitude, les mutations de postes, l’hygiène et la sécurité, l’éducation sanitaire.

C’est souvent avec les cadres de l’entreprise que la liaison sera la plus difficile à établir. Ceux-ci, conscients de leurs compétences techniques, comprennent mal en quoi l’action du médecin peut les aider dans leurs tâches. Seul l’ingénieur peut résoudre certains problèmes techniques pour faire disparaître des nuisances. 

Avec le service du personnel, il s’agit d’une relation permanente et essentielle. En effet, les convocations des salariés aux visites médicales sont établies par entente entre le service de santé au travail et le service du personnel, à des heures fixes et selon un programme établi à l’avance.
Le médecin du travail doit connaître, en temps utile, la liste des nouveaux embauchés, la liste des salariés exposés aux travaux dangereux, la liste des absences, la liste des salariés ayant repris leur travail.

Le médecin peut orienter vers le conseiller du travail ou vers l’assistant social, les salariés qui ont besoin de leurs conseils ou de leur aide.


3) Evolution de la fonction de médecin du travail

Le rôle du médecin du travail, depuis sa création, a évolué au fil du temps : il a subi des mutations afin de s’adapter aux entreprises et aux différents besoins des salariés.

 a) Prise en compte de la réforme du travail 

La médecine du travail telle qu’elle est née en 1946 se concentrait sur l’aptitude au poste de travail. Cinquante-huit ans plus tard, la réforme lancée par le gouvernement cherche à l’orienter vers la prévention. Cette réforme de la médecine du travail répond à une directive européenne du 12 juin 1989 qui prône une approche pluridisciplinaire pour mettre en place la notion de santé au travail, avec, pour ambition la prévention primaire, notamment en développant la formation et l’information des salariés. La réforme a été amorcée en 1998 et traduite au plan législatif dans la loi de modernisation sociale de janvier 2002. Outre les débats sur la pénurie de médecins et sur la charge de travail qui en découle, la réforme aura des conséquences directes pour les salariés et les employeurs. Des conséquences jugées à la fois positives et négatives selon les personnes. 

b) La visite biennale

Un décret paru au journal officiel le 30 juillet 2004 modifie la périodicité de la visite médicale qui passe de douze mois à vingt quatre mois, excepté pour les salariés soumis à une surveillance médicale renforcée. Le nombre maximal d’entreprises en charge par médecin passe de 300 à 450 et le nombre maximum annuel des salariés suivis passe de 2700 à 3300. Premier impact, mathématique : les salariés seront moins suivis. « Pour le salarié, cette réforme implique une réduction du temps médical qui lui est accordé », affirme le docteur Lionel Doré, secrétaire général du syndicat national professionnel des médecins du travail. Cependant, le temps dégagé par la baisse de la fréquence des visites se traduira par un renforcement du travail sur le terrain. Le décret impose d’ailleurs à chaque médecin de passer cent cinquante demi-journées par an au sein des entreprises. « La baisse du rythme des visites médicales va introduire plus de souplesse et dégager du temps », estime le docteur François Jabot de l’Association lorraine des services médicaux du travail à Nancy.

c) Les populations à surveillance renforcée

Une partie des salariés continuera à bénéficier de la visite annuelle. Pour l’instant, les populations concernées restent celles définies par un décret de 1977. La plupart des médecins, et des syndicats s’accordent à dire que les catégories doivent être redéfinies. Les travailleurs sur écrans font, par exemple, partie des populations jugées à risque. En plus des catégories précisées par le décret, les employeurs peuvent désigner telle ou telle population, sur conseil des médecins du travail.

d) La pluridisciplinarité

La pluridisciplinarité mise en place par la réforme devrait permettre d’alléger le travail du médecin pour certaines tâches et d’améliorer la prévention. Dans cet objectif de prévention, de nouveaux intervenants en prévention des risques professionnels (IPRP) seront amenés à épauler la médecine du travail : ergonomes, hygiénistes, toxicologues…
Les syndicats craignent cependant que les IPRP ne bénéficient pas de l’indépendance des médecins du travail. Une crainte qui n’est pas partagée par ceux qui soulignent l’ambiguïté existante du statut du médecin du travail. « Je ne crains pas un manque d’indépendance des IPRP, en tout cas pas plus que pour les médecins » (docteur Jabot).
Le médecin du travail est certes indépendant dans la manière d’organiser son travail et il doit se tenir au secret médical. Mais quand il donne son avis à l’employeur, celui-ci est ensuite libre de faire ce qu’il souhaite. Le médecin du travail n’a plus alors qu’à contacter l’inspection du travail s’il constate une faute grave.

e) Evolution dans le contenu de ses missions

Le médecin du travail se voit confronté à une évolution de ses missions, il doit faire face à des phénomènes nouveaux : dépistage du surmenage physique et nerveux, alcoolisme, réadaptation des accidentés, éducation sanitaire, vieillissement de la population active, obésité, stress, harcèlement…

L’obésité et le stress d’un salarié peuvent se traduire, sur le plan professionnel, par des problèmes en termes d’absences maladies et éventuellement d’inaptitude physique. Leur origine peut être liée aux conditions :
-          de restauration lors du déjeuner : restaurant fréquent pour raisons professionnelles ou au contraire sandwich du fait d’un temps de pause très court.
-          de travail, de management de l’entreprise

Le médecin du travail doit donc intervenir afin de lutter contre ces phénomènes : il peut agir en faisant des campagnes de prévention contre l’obésité ou modifier, s’il le peut, certaines conditions de travail par exemple.

Il ne doit pas que préserver la santé physique du salarié, il a aussi le devoir de préserver la santé mentale de celui-ci, notamment en luttant contre les phénomènes de harcèlement moral. Afin d’assurer la prévention et la dénonciation des agissements de harcèlement moral, le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que des mutations ou des transformations de postes.

L’entrée des jeunes dans la vie active peut également poser des difficultés. En effet, ils peuvent faire face à des problèmes d’adaptation qu’il appartient au médecin de travail de dépister et, éventuellement, de résoudre.

Le médecin du travail se trouve donc confronté à un environnement technique et médical en constante évolution. Des besoins nouveaux en termes de prévention apparaissent. Ces situations complexes exigent des compétences nouvelles. C’est dans cette perspective que le service prévention des risques professionnels de la C.R.A.M.I.F propose aux médecins du travail des journées de perfectionnement médico-technique ; dans le cadre d’échanges de savoirs et de savoir-faire avec d’autres spécialistes et institutions (D.R.T.E, D.D.T.E…).
Le rôle d’expert du médecin du travail doit être renforcé car l’évaluation des risques est aussi tributaire d’une amélioration de la multi-compétence des services de santé au travail.

II)  Rôle du C.H.S.C.T


1)   Définition du C.H.S.C.T

a) Conditions à sa constitution (Art. L.236-1; Art. L.236-6)

Le Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail est une institution représentative du personnel, dotée de pouvoirs délibératifs pour l’ensemble des questions de santé, de sécurité et de qualité de vie au travail.
La constitution d’un C.H.S.C.T est obligatoire dans tous les établissements d’au moins 50 salariés. L’effectif se calcule au niveau de l’établissement.

Dans les établissements de 50 salariés et plus où il n’a pas été possible de créer un C.H.S.C.T (carence de candidatures), ce sont les Délégués du Personnel qui exercent les attributions du C.H.S.C.T et qui disposent des mêmes moyens que les membres du comité.

Dans les établissements de moins de 50 salariés, ce sont là encore les Délégués du Personnel qui sont investis des missions dévolues aux membres du C.H.S.C.T, mais cette fois dans le cadre de leurs moyens propres sauf dispositions autres et plus favorables mentionnées dans la convention collective.

Il peut également arriver que l’inspecteur du travail impose la création d’un C.H.S.C.T quand cela lui paraît nécessaire.

Les entreprises de moins de 50 salariés ont la possibilité de se regrouper sur le plan professionnel ou inter-professionnel pour créer un C.H.S.C.T.

Dans les établissements de 500 salariés et plus, plusieurs comités peuvent être créés. Dans les entreprises comportant des établissements distincts, il y aura un C.H.S.C.T par établissement.

b) Composition et fonctionnement (Art. L.236-5)

Le C.H.S.C.T comprend obligatoirement :
  • le chef d’établissement (ou son représentant) qui en est le président.
  • une délégation du personnel (dont les membres sont désignés par les D.P et par les membres élus du C.E) dont la durée du mandat est de deux ans. La réglementation ne prévoit pas la désignation de suppléants et aucune condition particulière n’est requise pour pouvoir être désigné membre du C.H.S.C.T. Ainsi, tout salarié de l’établissement peut devenir membre du comité.
Le nombre de représentants du personnel au sein du C.H.S.C.T varie selon la taille de l’effectif (au niveau de l’établissement).
  • le ou les médecins du travail chargés de la surveillance médicale du personnel, ainsi que le chef du service de sécurité et des conditions de travail.
  • le C.H.S.C.T peut faire appel à titre consultatif et occasionnel au concours de toute personne de l’établissement qui lui paraîtrait qualifiée (infirmière…).
  • L’inspecteur du travail et le représentant du service prévention de la C.R.A.M sont invités à toutes les réunions du C.H.S.C.T.

Le C.H.S.C.T se réunit au moins une fois par trimestre à l’initiative du chef d’établissement. Il doit également se réunir à la suite de tout accident ayant entraîné ou ayant pu entraîner des conséquences graves. Enfin, il doit être convoqué si deux de ses membres, représentants du personnel, en font la demande.
Ces réunions ont lieu dans un local approprié et sauf exception, pendant les heures de travail.
Le chef d’établissement et les représentants du personnel sont les seuls à disposer d’une voix délibérative au sein du C.H.S.C.T, en ce qui concerne ses modalités de fonctionnement et l’organisation de ses travaux. Quant aux autres personnes qui assistent aux réunions, elles n’ont qu’une voix consultative.
L’attribution d’un crédit d’heures est variable selon l’effectif relevant de chaque comité et peut être augmenté en cas de circonstances exceptionnelles (accident grave) ou par accord interne. Le temps passé aux réunions, aux enquêtes après accident, ou pour faire face à des situations d’urgence et de gravité n’est cependant pas imputé sur le crédit d’heures.

c) Rôle et missions (Art. L.236-2)

Le C.H.S.C.T veille à la « protection de la santé physique ou mentale et de la sécurité des salariés », y compris en matière de harcèlement sexuel et moral. Cette protection concerne aussi bien les salariés de l’établissement, que ceux mis à la disposition de celui-ci par une entreprise extérieure, y compris les travailleurs temporaires.
Ce comité, à qui la jurisprudence a reconnu la personnalité civile, peut donc « ester en justice ».
Ses attributions consistent principalement à :
  • analyser les conditions de travail et évaluer les risques professionnels exposant les salariés de l’établissement et plus particulièrement les femmes enceintes.
  • développer la prévention par des actions d’information et de sensibilisation.
  • analyser les circonstances et les causes des accidents du travail ou des maladies à caractère professionnel.
·         procéder à des inspections régulières (au moins une par trimestre). Ces inspections doivent permettre au C.H.S.C.T de s’assurer de l’application des prescriptions législatives, réglementaires et des conditions d’hygiène et de sécurité.
Les inspections font l’objet d’un P.V de visite d’établissement. 
·         réaliser des études : le C.H.S.C.T doit participer aux réflexions relatives à l’organisation matérielle du travail, à l’environnement physique du travail, à l’aménagement des locaux et des postes de travail. Il devra également étudier l’incidence de l’introduction de toute technologie nouvelle sur les conditions de travail. Au besoin, il pourra faire appel à des experts agréés.
·         effectuer des enquêtes en cas d’accident du travail, ou de maladie professionnelle ou encore en cas d’incidents répétés ayant révélés un risque grave. Ces enquêtes sont menées par une délégation composée du chef d’établissement (ou de son représentant par délégation) et par un représentant du personnel au C.H.S.C.T.
Le rapport d’enquête doit être transmis à l’inspecteur du travail dans un délai de 15 jours. En cas de danger grave et imminent, le C.H.S.C.T peut être à l’origine d’une procédure d’alerte. Celle-ci est soigneusement graduée et de plus en plus dissuasive pour l’employeur.
·         Le C.H.S.C.T est également consulté avant tout aménagement important susceptible d’avoir une incidence sur les conditions de travail, d’hygiène et de sécurité.
Il intervient également lorsque l’employeur envisage de mettre en œuvre des   technologies introduisant des mutations de travail importantes.

Le chef d’établissement doit allouer au C.H.S.C.T les moyens nécessaires à la préparation et à l’organisation des réunions et déplacements imposés par les enquêtes ou inspections (pas d’obligation d’un local propre, en revanche, local approprié pour les réunions).
Le chef d’établissement doit également  fournir aux membres du C.H.S.C.T les informations nécessaires à l’exercice de leurs missions. De leur côté, les membres du comité sont tenus à une obligation de discrétion et au secret professionnel.

L’obligation de respecter et de faire respecter les prescriptions en matière d’hygiène et de sécurité pèse directement sur le chef d’entreprise. Ce dernier est «  tenu de veiller personnellement à la stricte et constante exécution des dispositions édictées en vue d’assurer l’hygiène et la sécurité des travailleurs ».
Le chef d’entreprise ne saurait donc invoquer pour sa défense la négligence ou la désobéissance de ses collaborateurs comme de la victime elle-même.
Cette obligation de sécurité est pénalement sanctionnée. Ainsi, l’employeur qui ne respecte pas la réglementation d’hygiène et de sécurité est passible de poursuites correctionnelles.

Le rôle du C.H.S.C.T est donc proche de celui du médecin du travail, ils ont tous les deux un rôle de prévention, d’enquête, d’étude et d’inspection. Ils traitent également des mêmes domaines : santé et sécurité.


2)   C.H.S.C.T et accident du travail

a) L’accident du travail : qu’est-ce que c’est ?

Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail, à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise (Art. L411-1 du code de la Sécurité Sociale).

La victime doit, dans la journée où l’accident s’est produit ou au plus tard dans les 24 heures, sauf cas de force majeure, en informer l’employeur ou l’un de ses préposés (Art. L441-1CSS).

Il est intéressant de savoir que le contrat de travail du salarié victime d'un accident du travail, est suspendu pendant la durée de l'arrêt de travail (Art. L122-32-1).
Au cours des périodes de suspension, l'employeur ne peut résilier le CDI que s'il justifie d'une faute grave de l'intéressé (Art. L122-32-2).

A l'issue des périodes de suspension définies à l'article L. 122-32-1, le salarié, s'il est déclaré apte par le médecin du travail, retrouve son emploi ou un emploi similaire assorti d'une rémunération équivalente (Art. L122-32-4).
La victime d’un accident du travail qui reste atteinte d’une incapacité permanente a droit à une rente d’accident du travail calculé selon les règles précises de la Sécurité sociale.
Le salarié déclaré inapte à son emploi par le médecin du travail à la suite d'un accident du travail, peut bénéficier des dispositions de l'article L122-32-5 du Code du Travail. L'employeur ne peut dès lors le licencier pour motif économique sans méconnaître ces dispositions (Cass. Soc. 14 mars 2000).

b) L’intervention du C.H.S.C.T dans l’accident du travail

En cas d’accident du travail survenu dans une entreprise où ont été relevés des manquements graves ou répétés aux règles d’hygiène et de sécurité du travail, la juridiction saisie doit faire obligation à l’entreprise de prendre toutes mesures pour rétablir des conditions normales d’hygiène et de sécurité du travail.
La juridiction imposée à l’entreprise doit, dans un délai qu’elle fixe, établir un plan de réalisation de ces mesures accompagné de l’avis motivé du C.H.S.C.T. (Art. L263-3-1).
En cas d’accident grave du travail, l’employeur procède, après avis du C.H.S.C.T, à une formation à la sécurité, au bénéfice des salariés concernés (R231-42).
La liste des postes de travail présentant des risques particuliers pour les salariés en CDD et sous contrat de travail temporaire, est établie après avis du médecin du travail et du C.H.S.C.T (Art. L231-3-1).

Bien que cela ne soit pas précisé clairement par les textes, le C.H.S.C.T doit être averti dans les plus brefs délais par l’employeur de tout accident susceptible de donner lieu à enquête.

La mission d’enquête accident du travail, est un des moyens les plus efficaces à la disposition des représentants du personnel pour le bon fonctionnement du C.H.S.C.T.
Pour utiliser correctement ce puissant moyen, il faut être particulièrement rigoureux sur la procédure de sa mise en œuvre.

 Obligation d’enquête

 

L'article L.236-2 du code du travail prescrit au C.H.S.C.T de faire des enquêtes en matière d'accident du travail ou de maladie professionnelle ou à caractère professionnel. Il doit donc fixer les missions d'enquête en matière d'accident du travail ou de maladie professionnelle ou à caractère professionnel, qu'il confie à ses membres.

 Rapport d’enquête obligatoire

 

La circulaire n 93-15 du 25 mars 1993 relative à l'application de la loi sur les C.H.S.C.T indique que les enquêtes ont lieu obligatoirement en cas d'accident du travail grave ou de maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave.
Le comité effectue obligatoirement un rapport d'enquête établi selon le modèle prévu, qui est transmis dans les quinze jours à l'inspecteur du travail.

Organisation pratique de l’enquête

 

L’expression "effectué par une délégation" qui est utilisée dans l'article R.236-10 a pu laisser croire aux employeurs qu'ils pouvaient suivre pas à pas les représentants du personnel lors de ces missions d'enquête. Pourtant, il est clair que la présence du chef d'établissement est de nature à influencer les témoins en limitant leur libre expression par une pression passive que cette présence à elle seule peut déjà constituer.
Le chef d'établissement n'a pas ce pouvoir que trop souvent il s'octroie. En effet, la loi et la réglementation n'imposent aucune forme pour réaliser les enquêtes en cette matière. Le C.H.S.C.T qui fixe les modalités de son fonctionnement peut donner mission à plusieurs personnes (membres ou non du C.H.S.C.T) d'effectuer une mission d'enquête.
Les personnes missionnées peuvent décider de se partager les tâches à accomplir. Comment le chef d'entreprise pourrait-il suivre pas à pas plusieurs personnes à la fois si ces personnes ne vont pas au même endroit ?
Les représentants du personnel et le chef d'entreprise n'ont pas le même rôle. Le C.H.S.C.T doit impérativement se prémunir des conflits d’intérêt qui ne peuvent manquer de se manifester.
Le chef d'entreprise doit pouvoir apporter son autorité au bon déroulement de l'enquête, il doit également donner les informations et les précisions qui peuvent être utiles aux enquêteurs. Mais le chef d'établissement ne doit pas entraver le bon déroulement de l'enquête en imposant avec sa présence un mode opératoire contraire à son développement.
  
3)   Double emploi entre C.H.S.C.T et médecin du travail

Le médecin du travail fait partie des membres ayant voix consultative, avec le chef du service de sécurité et des conditions de travail, ainsi que toute personne qualifiée (infirmière du travail, responsable de la formation, assistant de service social) invitée par le C.H.S.C.T. Certaines de ses missions se font donc en collaboration avec celui-ci.

a) Étude des postes 

Les actions menées sur le milieu de travail et l’organisation des examens médicaux sont des activités transversales. Il s’agit d’étudier les postes de travail, d’évaluer les conditions de travail (mesures métrologiques : ambiance sonore et lumineuse par exemple) et de dispenser des conseils en matière d’organisation des secours et des services d’urgence…

b) Gestion des risques 

Le médecin du travail et le C.H.S.C.T interviennent conjointement en matière de :
- gestion des accidents de travail,
- maladies professionnelles : le médecin et le C.H.S.C.T doivent pouvoir évaluer les risques professionnels au sein de l’entreprise et en dresser la liste.

  
c) Formation en entreprise 

Le médecin doit intervenir avec le C.H.S.C.T dans l’éducation sanitaire du salarié. Par exemple, il peut donner une formation sur « les gestes et postures », sur « le sauvetage - secourisme au travail »…

d) Expertise au sein des instances spécialisées 

  • Action du médecin du travail en entreprise
Des médecins spécialistes en santé au travail doivent aider les employeurs :
- leur délivrer des conseils et mener des actions en matière d'hygiène, de sécurité, de conditions de travail, d’évaluation des risques professionnels…
- effectuer des visites d'entreprises, études de postes dans le cadre de l'action en milieu de travail
- avoir des contacts en entreprise (réunions, C.H.S.C.T…).

  • Lien hiérarchique entre le médecin du travail et le C.H.S.C.T 

Le médecin du travail bénéficie d’un libre accès aux lieux de travail lors de visites de sa propre initiative, à la demande de l’employeur, du C.H.S.C.T ou des délégués du personnel. C’est lui qui procède aux examens médicaux auxquels les salariés sont tenus de se soumettre.

CONCLUSION
  
Le médecin du travail et le C.H.S.C.T ont donc deux rôles importants dans l’entreprise, mais ce rôle est-il le même ?
A première vue, on pourrait croire que oui car ils agissent tous les deux dans les mêmes domaines : la santé et la sécurité au travail. De plus, ils ont tous les deux un rôle de prévention et de sensibilisation auprès des salariés et de l’employeur.
D’une manière générale, la différence réside dans le fait que le médecin du travail est beaucoup plus proche du salarié que le C.H.S.C.T. Il suit les dossiers de chaque employé dont il a la charge, il connaît davantage les difficultés du quotidien de chacun, il constate les risques et les problèmes liés au travail ou aux postes de travail grâce à ses consultations et ses enquêtes. Le C.H.S.C.T, quant à lui, a une action beaucoup plus globale au niveau de l’entreprise. Alors que le médecin du travail agit au niveau individuel (pour chaque salarié), le C.H.S.C.T agit au niveau du collectif de l’entreprise. Il est donc légitime que le médecin du travail ait sa place au sein du C.H.S.C.T.

Le médecin du travail est, un salarié de l’entreprise et bien qu’il soit indépendant dans sa fonction, il est soumis à l’autorité de l’employeur. Même s’il possède un rôle de conseil auprès du chef d’entreprise, il est, avant tout, un de ses subordonnés. Son pouvoir d’influence et sa capacité d’action peuvent ainsi en être amoindris. Le C.H.S.C.T, en tant qu’Institution Représentative du Personnel, n’est pas soumis à l’autorité de l’employeur comme le médecin du travail : il est beaucoup plus indépendant et possède une plus forte influence pour mettre en œuvre ses actions. Par l’intermédiaire du C.H.S.C.T, le médecin du travail possède donc une voix plus forte.

On peut donc en conclure que les rôles du médecin du travail et du C.H.S.C.T sont complémentaires : le premier peut agir directement au niveau du salarié et le deuxième, de part sa structure, plus au niveau du collectif de l’entreprise.
On peut ajouter que le médecin du travail et le C.H.S.C.T ont des rôles prépondérants : la prévention des risques et la protection aussi bien physique que mentale des salariés. Malheureusement, ces rôles sont souvent méconnus ou mal perçus par les salariés. Les missions de ces deux acteurs ont donc évolué pour lutter contre ce phénomène : désormais, ils informent les salariés de leurs rôles respectifs.

Aujourd’hui, l’évolution démographique conjuguée à un environnement médical de plus en plus technique entraînent peu à peu des mutations au sein du service de santé au travail et créent de nouveaux besoins. Afin de répondre à cette nouvelle conjoncture, de plus en plus d’intervenants spécialisés interviennent au côté du médecin du travail et du C.H.S.C.T.

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